Produit d’épargne préféré des Français, l’assurance-vie est de nouveau dans le viseur du législateur. Le projet de loi de finances 2026 introduit un double mouvement : encourager la transmission anticipée via un mécanisme de donation en franchise d’impôt, tout en préparant une hausse des prélèvements sociaux sur les revenus du capital.
C’est la mesure la plus commentée du projet. Un amendement adopté en commission des finances prévoit d’autoriser, à titre expérimental, la transmission anticipée de l’épargne d’assurance-vie sans attendre le décès du souscripteur.
Le dispositif permettrait à un épargnant de donner à ses bénéficiaires jusqu’à 152 500 € de capital en exonération de droits de succession, dès lors que les versements ont été effectués avant 70 ans.
L’objectif du gouvernement : favoriser la circulation du patrimoine dans un contexte de vieillissement de la population et de blocage de l’épargne. En pratique, cette donation anticipée utiliserait le même abattement que celui applicable au décès : elle ne créerait donc pas d’avantage supplémentaire, mais offrirait une souplesse de calendrier pour transmettre plus tôt.
Les acteurs du patrimoine saluent une mesure « utile, mais à manier avec discernement ». Pour Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Épargne, « cela permet de fluidifier la transmission sans pénaliser la logique successorale. Mais la règle d’imputation sur l’abattement existant réduit la portée réelle du dispositif. »
Cette ouverture serait applicable aux contrats en cours et aux nouveaux versements réalisés en 2026, sous réserve d’une validation définitive en loi promulguée. Les assureurs attendent encore les précisions techniques : modalités de désignation, justificatifs à fournir et traitement fiscal en cas de rachats ultérieurs.
Vers une fiscalité plus lourde sur les produits de placement
L’autre évolution, moins médiatisée mais potentiellement plus sensible, concerne la hausse annoncée des prélèvements sociaux. Dans un contexte de déficit public élevé et de financement de la protection sociale, Bercy envisage d’augmenter la CSG sur les revenus du capital, y compris ceux des contrats d’assurance-vie.
Selon plusieurs sources de place, la hausse pourrait porter la CSG de 9,2 % à 9,9 %, ce qui ferait passer le taux global des prélèvements sociaux à 18 % sur les produits de placement (contre 17,2 % actuellement).
Une telle mesure rognerait légèrement les rendements des contrats, notamment sur les fonds en euros, dont la performance moyenne tourne autour de 2,5 % à 2,7 % en 2025. Pour les unités de compte, l’impact serait plus progressif mais pèserait sur les sorties et rachats.
En revanche, aucune remise en cause du régime fiscal de long terme n’a été votée :
• le PFU de 30 % (12,8 % d’impôt + 17,2 % de prélèvements sociaux) reste la norme ;
• les abattements de 4 600 € (personne seule) et 9 200 € (couple) après huit ans sont maintenus ;
• et les exonérations de 152 500 € par bénéficiaire pour les primes versées avant 70 ans demeurent inchangées.
La stabilité affichée du cadre juridique n’exclut pas une vigilance accrue. Le ministère des Finances a d’ailleurs annoncé un audit global de la fiscalité de l’épargne en 2026, pour harmoniser les régimes entre assurance-vie, PEA, PER et livrets réglementés.
Entre modernisation et signal politique
Au-delà des ajustements techniques, la réforme traduit la volonté de rééquilibrer la fiscalité du capital. En autorisant la transmission anticipée, l’exécutif envoie un signal positif aux épargnants ; mais la hausse de la CSG rappelle que la manne de l’assurance-vie, forte de 1 950 milliards d’euros d’encours, reste une ressource fiscale potentielle.
2026 s’annonce comme une année charnière :
• les détenteurs de contrats anciens devront vérifier leurs clauses bénéficiaires ;
• les souscripteurs proches de 70 ans pourraient anticiper des versements pour sécuriser leur fiscalité actuelle ;
• et les investisseurs devront arbitrer entre fonds en euros, unités de compte et diversification hors assurance-vie selon les rendements nets après impôts.
En attendant l’adoption définitive du texte, la prudence reste de mise : le diable se cache dans les décrets d’application. Mais une chose est sûre : l’assurance-vie, pilier du patrimoine français, entre dans une nouvelle phase d’ajustement fiscal et successoral où l’anticipation redevient la meilleure des stratégies.





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